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mercredi

Ben Ali ou le sort d’un tyran

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Ben Ali ou le sort d’un tyran

24 février 2011

Exilé en Arabie saoudite, l'ex-président tunisien est l'objet de toutes les rumeurs. On le dit à l'article de la mort et abandonné de tous. Une grande leçon qui sonne comme un avertissement pour les autres dirigeants arabes.

La mort de Pélopidas, par Andrey Ivanov (1805_1806)
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Ben Ali. On parle de moins en moins de lui. On le dit à l’agonie, peut-être même serait-il mort des suites d’un accident cérébral, là-bas, dans le royaume des Wahhabites.

Leila absente

N’allons pas le plaindre, mais tout de même, quelle terrible fin! Il paraît que plus personne n’est à son chevet, puisque sa femme Leila serait repartie dans le Golfe ou en Libye.
Qu’espère-t-elle? Se croit-elle encore en ces temps où, revenue d’un lointain exil, une souveraine pouvait lever une armée et reconquérir la terre dont elle avait été chassée par quelque sanglante révolte ou jacquerie?

Leila s’est-elle mise en tête d’épouser un riche cheikh du Golfe? Va-t-elle tenter de séduire Kadhafi? Il se dit qu’elle négocie la libération des siens, surtout celle de son neveu Imad Trabelsi —dont la rumeur populaire laisse entendre qu’il serait plutôt son fils. Elle menacerait, appellerait tel ministre ou tel homme d’affaires. Elle veut continuer à faire peur, à en imposer. A exister.

Le Jugement dernier, et celui du peuple

Et, pendant ce temps-là, son mari agonise. Seul, sans aucune main pour se poser sur son front, sans aucun visage inquiet qui guetterait son improbable réveil, sans prières pour implorer un miracle.

A Tunis, le peuple est croyant comme on l’est un peu partout dans le monde arabe. Il se demande: comment Ben Ali va-t-il faire face au Maître du Jugement dernier? Que plaidera-t-il pour sa défense? L’ange chargé du décompte de ses bonnes actions trouvera-t-il quelque chose à dire?

Le peuple ne peut pardonner ni oublier. Les morts de Kasserine, de Sidi Bouzid, les condamnés à mort, les emprisonnés. A la télévision, il voit un palais présidentiel truffé de bijoux en or, de diamants et de caisses qui débordent de liasses de billets. Euros, dollars, dinars tunisiens, livres turques…

Maudit par ses pairs

Voleur, le Ben Ali. Un minable kleptocrate comme tous les autres dictateurs arabes qui doivent désormais le maudire. Moubarak hier, Kadhafi demain, les roitelets du Golfe après-demain.
Tous se diront que c’est de sa faute, c’est lui qui a trop volé, qui s’est laissé berner par sa femme et qui a attiré sur nous le vent de la colère. C’est lui le responsable, le faible qui s’est sauvé au lieu de mourir les armes à la main. Pauvre Ben Ali, même ses pairs le haïssent et le méprisent.
Il faudrait écrire le roman de sa fin de vie. Quelques jours de solitude, un hiver très court, un homme qui se croyait patriarche et que l’on abandonne à son sort, comme un meuble qui ne sert plus à rien.

Est-ce que cela va obliger les autres tyrans à réfléchir, à comprendre qu’il y a parfois une justice en notre monde? Peut-être. Peut-être pas.

En attendant, un homme, dans un hôpital saoudien, est en train de mourir, seul, sans personne pour le veiller. Ni clientèle, ni courtisans. Abandonné par tous, y compris par les siens.
Voilà déjà une grande leçon qui sonne comme un avertissement pour tous les dirigeants arabes qui ne veulent pas lâcher le pouvoir… 

Akram Belkaïd
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